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image de gauche © éditions le livre de poche / image de droite © éditions Gallimard

 

Big Banguienne, Big Banguien,
Cher lecteur, mon seul bien !

 

Connaître sa sexualité, une évidence pour notre siècle. 150 années avant pourtant, l’homosexualité attentait aux bonnes mœurs. Qu’il a été long, le chemin de la libération ! Sur cette voie patiemment pavée, vous trouverez Rimbaud et Verlaine, le couple célèbre de la poésie française.

Rimbaud : un homme révolté et voyant

Attardons-nous sur le premier. Un mot reste attaché à Arthur Rimbaud, révolté. Contre sa famille, contre les convenances morales, religieuses, bourgeoises, contre l’Empire, la République de Thiers. Autre mot, voyant ! Pour Rimbaud, ce rôle du poète l’amène à un « dérèglement des sens. Toutes les formes d’amour, de souffrance, de folie ; (…) il épuise en lui tous les poisons pour n’en garder que la quintessence ». Sa voyance à lui sera donc celle des sensations, des hallucinations.

 

Une saison en enfer

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Rimbaud en enfer par Laurence Lesager avec la photo de Felix Weinitschke sur Unsplash  et celle de la couverture de Poésies – Une saison en enfer – Illuminations chez Folio.

 

Amour, souffrance, folie, hallucination ! Tous ces mots définissent la « saison en enfer » que traverse ensemble le couple Rimbaud-Verlaine. Leur début est une fascination mutuelle ; Rimbaud envoie à Verlaine quelques poèmes à l’automne 1871, celui-ci fait venir le jeune génie à Paris… Commence alors leur relation aussi scandaleuse qu’orageuse.

En juillet de l’année suivante, Rimbaud quitte la capitale. Verlaine, après de vaines tortures, quitte femme et enfant, fugue avec lui. S’ensuit une année de vagabondage en Belgique et en Angleterre, son épilogue, tragique, est connu…

La bohème vagabonde

 

maico-pereira-Z0Wa2A5NVTM-unsplashPhoto by Maico Pereira on Unsplash

 

Comme une évidence, « Vagabonds » est le titre d’un poème déchirant consacré à leur vie de bohème. Je t’en avais parlé, auditeur subtil, pour ne le citer, honteusement, qu’en aparté dans ma première chronique, me semble-t-il. Ce poème mérite mieux : en pleine lumière, être présenté. Tout le poème est consacré à l’éternel tourmenté, Verlaine, et sa faute maîtresse, une maladive faiblesse. « Pitoyable », « guignon », « innocence », « chagrin idiot », tout exprime les doutes indépassables de son compagnon.

Alors, commençons : « Pitoyable frère ! Que d’atroces veillées, je lui dus ! ‘’Je ne me saisissais pas fervemment de cette entreprise. Je m’étais joué de son infirmité. Par ma faute, nous retournerions en exil, en esclavage.’’ Il me supposait un guignon et une innocence très bizarres, et il ajoutait des raisons inquiétantes. Je répondais en ricanant à ce satanique docteur, (c’est de Verlaine dont il parle…) et finissais par gagner la fenêtre. Je créais, par-delà la campagne traversée par des bandes de musique rare, les fantômes du futur luxe nocturne (projection… érotique entre les deux amants). Après cette distraction vaguement hygiénique, je m’étendais sur une paillasse.

Et, presque chaque nuit, aussitôt endormi, le pauvre frère se levait, la bouche pourrie, les yeux arrachés tel qu’il se rêvait, et me tirait dans la salle en hurlant son songe de chagrin idiot. J’avais en effet, en toute sincérité d’esprit, pris l’engagement de le rendre à son état primitif de fils du soleil.

Et nous errions, nourris du vin des cavernes et du biscuit de la route, moi pressé de trouver le lieu et la formule. ».

Verlaine, pas plus que Rimbaud, n’atteindra l’état de « fils du soleil ». Ce dernier n’entrapercevra qu’à peine « le lieu et la formule », ce sera l’Orient et le commerce.

 

 Verlaine vu par Rimbaud : la folie de la faiblesse

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Photo by Camila Quintero Franco on Unsplash

 

Voici, donc, le couple décrit à la première personne par Rimbaud lui-même, voyons comment il se place dans la tête de son comparse.
Le poème a été écrit une année avant « Les vagabonds », sa cruauté dénonce la faiblesse, il s’intitule « Vierge folle ». Elle parle tout du long, elle… est Verlaine !

« Je suis esclave de l’Epoux infernal », Rimbaud, « Lui était presque un enfant… Ses délicatesses mystérieuses m’avaient séduite. J’ai oublié tout mon devoir humain pour le suivre. Quelle vie ! La vraie vie est absente (…). Je vais où il va, il le faut. Et souvent, il s’emporte contre moi, moi la pauvre âme. Le démon ! C’est un démon, vous savez, ce n’est pas un homme. »

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Photo by ラデク ストーン on Unsplash

 

Tu vois alors, cher lecteur, pourquoi ces deux-là sont devenus mythes. Un génie fulgurant… et homosexuels en un temps où il valait mieux ne pas l’être. En cette matière, on ne choisit pas, mais on peut l’assumer… Alors, inspirons-nous des deux génies !

 
Prends bien soin de toi, mon ami, et je te dis à très vite !