Il y avait les naufragés de l’autocar, il y a maintenant les naufragés du mariage. Echoués dans les vestiaires, au milieu des vestes et manteaux des invités, quatre jeunes adultes devisent sur leurs défaites, pendant que d’autres la font, la fête.

A première vue, après seulement quelques tirades, le spectateur pourrait penser qu’il s’agit de quatre stéréotypes échappés d’un manuel d’apprenti écrivain. Ils sont en réalité, on s’en rendra compte assez tôt, plus complexe que cela, bien différents des clichés jaunis vus et revus. Ils nous ressemblent d’ailleurs étrangement, avec leurs paradoxes et leurs manques, leurs frustrations et leurs douleurs. Chacun essaie d’avancer tant bien que mal, certains plus vite que d’autre, en apparence. Car le jeu auquel ils jouent est de penser ce qu’ils ne disent pas, de montrer beaucoup pour cacher l’essentiel. Ces moments de contradictions sont joliment rendus par un temps suspendu, où trois comédiens se figent et un seul, en adresse public, nous livre le fond de sa pensée.

Dans cette pièce de 20m2, ils tenteront de trouver une liberté, quelque part entre les souhaits de leurs cœurs et les attentes de la société. Si l’un utilise cette soirée comme thérapie de groupe, l’autre recrutera les membres de sa prochaine révolution. Leurs motivations sont plurielles et pourtant n’ont qu’un seul et même but : se trouver eux-mêmes. C’est aidé par le groupe qu’ils y parviendront.

Les comédiens incarnent avec justesse le moment délicat où l’on réalise que les choix faits ne correspondent pas aux idéaux attendus. La mise en scène dynamique, rythmée ne laisse quant à elle aucune place à l’ennui. Le spectateur oublie les murs du huis-clos, transporté par un texte riche et libre, alternant entre lucidité, malice et cynisme, et appuyé par des jeux de sons et lumières bien trouvés. L’avancement de leur soirée est suivi avec enthousiasme et curiosité, empathie ou désapprobation, aussi parfois, mais toujours avec attention.

Pas de doute, les invités auraient préféré manquer le mariage et passer la soirée dans ce vestiaire.

Au Funambule Montmartre les 4 mardis de novembre 2022 (le 8 à 21h, le 15 à 19h, le 22 à 21h et le 29 à 21h)

Auteur : Manon Viel / Mise en scène : Adrien Popineau 

Interprètes : Dimitri Defontaine, Juliette Delhomme, Barthélémy Heran, Manon Viel / Régisseur : Eric Valentin