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Monster Boy et le Royaume Maudit : l’héritier légitime de Wonder Boy.

Il y a des jeux qui marquent à vie les souvenirs des joueurs et les Wonder Boy font partie de ceux-là. Si comme moi vous avez eu la chance de posséder une console SEGA dans les années 90 vous avez probablement joué à Wonder Boy in Monster Land, Wonder Boy 3 : The Dragon’s Trap ou aux Monster World 3 et 4. Ces jeux faisaient partie des plus célèbres licences de chez Sega au même titre que Sonic The Edgehog ou Alex Kidd. Cependant, malgré sa renommée auprès des joueurs, la licence est tombée peu à peu dans l’oubli du côté de l’éditeur qui n’a plus rien sorti depuis le dernier épisode sur Mega Drive en 1994; probablement suite à ses déboires en tant que fabricant de consoles. Si on pouvait retrouver ces titres dans de nombreuses compilations à la gloire de la Mega drive ou sur les Virtual Console de la WII ou de la WIIU, l’espoir des fans de retrouver un jour leur héros préféré dans de nouvelles aventures était bien faible. Du moins jusqu’à ce que les développeurs talentueux du studio Parisien Lizard Cube se décident à sortir un remake de toute beauté de Wonder Boy 3, The Dragon’s Trap en 2017. Remake dont nous vous avons d’ailleurs déjà parlé et dont vous pouvez lire le test sur notre site. 

Coïncidence ou miracle, parallèlement une autre équipe de  développeurs (eux aussi basés à Paris) travaillaient sur un projet beaucoup plus ambitieux; celui de sortir un nouvel épisode inédit des aventures de Wonder Boy qui même s’il n’en portait plus le nom, sans doute pour des raisons de droits, reprendrait l’ADN complet de la série. Après cinq ans de développement et de nombreux reports Monster Boy et le Royaume Maudit du studio Game Atelier et édité par  FDG Entertainment (Ocean Horn, Blossom Tales : The Sleeping King) est enfin disponible sur Playstation 4, Xbox One et Nintendo Switch. Juste à temps pour fêter comme il se doit les 30 ans de Wonder Boy.

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Comme à chaque fois dans les jeux Wonder Boy : à nouvelle aventure,  nouveau héros. Vous incarnez désormais le jeune Jin qui en pleine séance de pêche à la ligne voit sa journée perturbée par l’irruption de son oncle, un bouffon déjanté et alcoolique, fonçant à travers le ciel sur un tonneau volant. Celui-ci transforme en monstres tous les habitants de Monster World à grands coups de baguette magique. Si votre frère Zeke a eu la « chance » d’être transformé en dragon, vous vous en sortez beaucoup moins bien et et vous voilà changé en cochon. Mais attention pas n’importe quel cochon! LE célèbre cochon borgne qui tenait les boutiques dans plusieurs épisodes de Wonder Boy. Sous cette forme pas vraiment faite pour le combat vous ne pouvez compter que sur vos coups de « pied de cochon » pour massacrer les premiers ennemis qui vous barrent la route.

C’est ainsi que débute votre quête qui consistera à récupérer cinq orbes magiques qui permettront d’inverser la malédiction causée par votre oncle.

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Monster Boy et le Royaume Maudit reprend la recette des trois épisodes précédents; à savoir un jeu de plates-formes en monde ouvert divisé par zones reprenant les décors canoniques de la série tels qu’une plage paradisiaque, une forêt lugubre, un temple maya. Il propose aussi des lieux inédits comme un terrifiant manoir hanté, un volcan en éruption ou une grotte de cristal. Comme tout bon Metroidvania qui se respecte l’acquisition de nouveaux pouvoirs vous permettra d’explorer de nouvelles zones mais aussi de débusquer des trésors cachés dans les zones déjà visitées.

Ces pouvoirs associés à chaque transformation sont véritablement au centre du gameplay du jeu. Chaque orbe que vous récolterez après avoir affronté un boss vous permettra de vous transformer en un nouveau personnage aux pouvoirs exclusifs.

Le cochon borgne possède un flaire porcin qui permet de faire apparaître les secrets cachés dans le décor. Il est le seul à pouvoir déterrer les super truffes magiques qui accordent les pouvoirs magiques comme les célèbres boules de feu, tornades, éclairs et boomerangs qu’on retrouve souvent dans les jeux Wonder Boy. Il est d’ailleurs le seul personnage qui peut les utiliser.Le serpent par sa petite taille peut ramper dans des trous et s’agripper aux surfaces recouvertes de mousse. Il peut aussi se défendre en crachant du venin sur ses ennemis.La grenouille, elle,  peut nager librement dans l’eau, utiliser sa langue pour gober certains ennemis et s’accrocher tel un grappin à certains dispositifs. Le lion très endurant est un excellent combattant et est capable de sprinter pour défoncer des blocs de pierre. Enfin, le dragon peut naturellement voler et cracher du feu.

Contrairement à Wonder Boy 3 : The Dragon’s Trap qui ne le proposait qu’à la fin du jeu, il est possible dès le début de l’aventure de permuter à volonté entre les différentes formes que vous possédez. Il n’y a pas de personnage en retrait par rapport aux autres, ils sont à la fois uniques en leur genre et complémentaires. La coopération des cinq personnages sera nécessaire dans l’accomplissement de votre quête et il faudra souvent jongler rapidement entre eux, surtout vers la fin du jeu.

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Bien qu’on aurait pu craindre vue son apparence très kawaï (mignonne) que Monster Boy et le Royaume Maudit soit destiné à un jeune public, il n’en est rien et le jeu propose même une sacrée dose de défis. Il hérite aussi dans son ADN de la difficulté propre à la série. Les premiers niveaux sont assez faciles puisque vous ne possédez qu’une ou deux formes et vous en déduisez donc que les pouvoirs que vos personnages possèdent sont ceux qu’il faut utiliser. Par contre les derniers niveaux se montrent beaucoup plus retors et il faudra sérieusement faire marcher vos cellules grises pour résoudre les dernières énigmes du jeu.

Les ennemis malgré leur air inoffensif et leur bonhomie s’avèrent être des combattants redoutables et pugnaces. Sans compter les nombreux boss qui ont bénéficié d’un énorme soin de la part des développeurs dans leurs patterns et qui demanderont parfois plusieurs essais avant de trouver la technique à utiliser pour les battre.

C’est donc à vous de mettre toutes les chances de votre côté, de bien réfléchir aux potions que vous transportez et à votre équipement composé d’une arme, d’une armure, d’un bouclier, de bottes et d’un bracelet. Cette gestion de l’inventaire donne un petit cachet RPG supplémentaire au jeu qu’on retrouvait déjà dans les trois épisodes précédents mais qui est encore plus prononcé et primordial ici. En effet si les boutiques de potions, d’armes et de magies sont toujours présentes comme dans les anciens jeux, les forgerons font leur apparition et joueront un rôle important. Ils peuvent améliorer les armes que vous possédez en leur conférant des aptitudes contre les altérations d’état telles que le poison, la lenteur ou la confusion, causées par certains ennemis ou éléments de décor. Evidemment ces aptitudes ont un prix à payer et il faudra pour les acheter trouver des pierres précieuses très bien dissimulées dans des coffres partout dans le monde. Vous n’avez pas fini de fouiller le jeu de fond en comble pour dénicher ces précieuses gemmes.

Rassurez-vous les développeurs de Game Atelier ont eu la bonne idée d’intégrer une carte très pratique qui se dévoile au fur et à mesure que  vous découvrez de nouveaux lieux. Celle-ci indique en permanence l’objectif où vous devez vous rendre ainsi que la position des coffres à trésors que vous avez découverts. Si vous ne possédez pas la bonne aptitude pour les ouvrir, vous les retrouverez aisément ensuite. A vous donc de voir si vous utiliserez la carte pour vous guider, ou pas, pour une aventure un peu plus à l’ancienne. Pour les complétistes qui voudront découvrir découvrir cent pour cent des objets et des secrets, la carte sera votre meilleure alliée.

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Si le jeu peut se montrer difficile, il n’est jamais punitif et fera toujours preuve de bienveillance envers les joueurs les moins doués. Il ne propose pas de modes de difficulté mais les check points sont nombreux  et votre frère Zeke viendra vous donner un coup de pouce lors des combats de boss si vous échouez plusieurs fois en vous balançant des cœurs de vie et des magies pour vous aider. De même lors d’une des énigmes un peu trop ardue du jeu, un compagnon surprise issu de Monster World IV viendra vous filer un tuyau si vous êtes à court d’idées et que vous êtes bloqué. La courbe de difficulté évolue progressivement  au fur et à mesure de l’aventure. Plus vous vous rapprocherez de la fin plus les énigmes seront difficiles. Si elles vous paraîtront peut-être parfois insurmontables, vous finirez par vous rendre compte qu’elles répondent toutes à une certaine logique.

Sur le plan technique Monster Boy et le Royaume Maudit est une véritable oeuvre d’art. On a l’impression de jouer un dessin animé. Des personnages aux environnements, tout est dessiné à la main et bénéficie d’animation incroyables. Vous allez souvent rester bouche bée devant la beauté des décors. Les développeurs de Game Atelier nous donne une leçon de character design et surtout de level design. Des ruines Mayas avec leurs pièges et mécanismes incroyables au manoir hanté avec ses puzzles basés sur la lumière, tout est millimétré avec une précision incroyable. Un véritable travail d’orfèvre qui  renouvelle sans arrêt les mécaniques du jeu dans chaque zone ou à chaque transformation. Et que dire des musiques fabuleuses qui vous accompagnent pendant l’aventure et qui réinterprètent avec brio de nombreuses mélodies issues des jeux précédents. Du grand art!

Aucune fausse note de la part de Game Atelier qui aura respecté, presque religieusement, l’ADN et l’héritage Wonder Boy tout en lui donnant la modernité qu’on attendait en 2018. Le fan-service est énorme avec plein de caméos issus des épisodes précédents et de détails bourrés d’humour qui feront sourire au premier coup d’œil les fans de la saga. Monster Boy et le Royaume Maudit est donc un jeu respectueux de ses origines, fait par des fans pour les fans et cela se voit chaque minute du jeu. Merci et bravo à Game Atelier pour cette madeleine de Proust qui met des étoiles pleins les yeux et qui rappelle pendant la trentaine d’heures passées en sa compagnie à quel point les jeux Wonder Boy étaient, et restent, fabuleux. Croisons les doigts pour que Game Atelier continue sur ce succès et nous proposent une suite.

On ne peut reprocher qu’une seule chose à l’éditeur. Un tel bijou aurait mérité comme écrin une sortie physique en Europe alors que nous devons nous contenter de versions dématérialisées vendues une quarantaine d’euros sur Xbox One, Playstation 4 et Nintendo Switch. Un comble quand on sait que le jeu a été créé en France et édité par une compagnie allemande. On ne pourra que conseiller aux collectionneurs qui veulent profiter d’une jolie boite remplie de goodies avec une superbe notice illustrée (comme à la belle époque) de se tourner vers l’import pour se procurer le jeu vendu en boite sur le marché américain (non zoné et en français sur PS4 et Switch!). Histoire de glisser Monster Boy et le Royaume Maudit sous le sapin à Noël.